Note de lecture

Stéphane Barsacq, Solstices, Corlevour – par Pierrick de Chermont

Faut-il s’intéresser à nouveau à la Morale, entendue comme un pan de la littérature où une voix exprime sa vie intérieure sous forme de monologue, d’interrogations, de quête, de résolutions ; parlant de sa vitalité et de sa misère ; en premier lieu, à elle-même, et secondairement à son lecteur ? La littérature française y a inscrit quelques pages mémorables ; au XVIIe siècle bien sûr, et plus récemment celles d’Émil Cioran. La morale, ainsi entendue, se caractériserait par une forme aphoristique, mêlant des brèves et des longues, un aplat sans pente, sans progrès ou sans descente, un usage du paradoxe qui force à suspendre la lecture pour en écouter ses effets de résonance.

Je voudrais ajouter Stéphane Barsacq à cette liste d’auteurs, à condition d’y préciser aussitôt comment il renouvelle le genre. Sa morale n’est pas en recherche d’une retraite comme le propose l’antiquité ; ni le gant de fer d’une spiritualité austère des ouvrages de pieuseté du XIXe ; mais celle d’un mémorialiste qui travaillerait à partir du sel de ses rencontres d’auteurs. Ainsi, il nous remonte des questions nouvelles, ou renouvelées, qui nous surprennent par leur vitalité, nous parlent doucement, alors que, avant elles, tout était silence inhabité.

Solstices ferme une trilogie qui compte deux autres ouvrages, Mystica et Météores…. Le premier, propose en neuf chapitres des séries de méditations invitant à « organiser sa vie à la manière des marées montantes ». Le deuxième propose un abécédaire de mots et de noms, vrais météores de l’auteur, qui lui font proposer à l’entrée Nourriture : « Je me nourris de lumière plus que tout. » Le dernier opus, Solstices débute par une série d’apophtegmes sur « Ce qui vaut d’être vécu », ou « Comment se tenir droit » ; il se poursuit par des méditations sur des figures centrales, écrivains, peintres, musiciens, et d’étonnants apartés sur le mariage ou « conseil à une jeune fille » ; il finit par des méditations qu’on qualifierait de bibliques – sur Isaïe, la parabole, l’Apocalypse – n’était son traitement inattendu où s’expose une réflexion personnelle par le miroir d’écrivains qu’il écoute fidèlement (ne pas oublier cette sentence qui justifie cet attachement : « le génie est le nom profane de la grâce »).

Pour compléter ma proposition de qualifier cette trilogie de morale pour l’aujourd’hui, à laquelle je tiens tant elle me paraît une des sources « vivantes » de la littérature actuelle – j’ajouterai que l’apport déterminant de Barsacq, est non seulement définir la morale comme une quête d’un état de plus grande humanité, mais surtout d’y apporter de la douceur, de l’apaisement (lire le premier vers du poème final d’envoi : « Ce que je sais de plus doux de cet état ») ; d’en finir avec la virulence batailleuse des ouvrages d’hier auxquels nous ne croyons plus. Mais, si tel est le cas, me direz-vous, comment résumer la morale barsacquienne ? Je proposerais simplement : « Agis. Ton meilleur pédagogue pour une vie pleine (morale), ce sont tes actes ».

Pierrick de Chermont

François Bordes, Zone perdu, par Anne Mulpas

Zone perdue – fragments d’itinérance. Je reprends ma chronique. Sa première version date déjà d’il y a trois semaines. A L’ours & la vieille grille. Sa deuxième version s’impose après mon cheminement dans l’exposition Rothko. Me voici au troisième temps du texte, à moins que ce ne soit le quatrième, le centième…

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Étienne Faure, Vol en V, éditions Gallimard – par Anne Gourio

Note de lectureComme on suit, fasciné, la trajectoire des oiseaux migrateurs, le dernier recueil d’Etienne Faure puise dans le ballet aérien de leur « vol en V » un sens de l’élan, du franchissement, du frayage qui se nuance en légères et souples inflexions au fil des espaces traversés à...

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Frédérique Guétat-Liviani, Il ne faudra plus attendre un train, éditions LansKine – par Étienne Faure

Ce recueil emprunte son titre à l’une des trois parties qui le composent : si c’était le cas, (passe) ; il ne faudra plus attendre un train. En découvrant cette composition, on pense spontanément à un ensemble où viendrait s’intercaler le texte de (passe). Puis l’œil et l’oreille distinguent vite une même voix, dans ces deux pans, deux partis pris formels différents dans le cheminement de l’écriture de Frédérique Guétat-Liviani.

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Le journal des poètes 1/2022 – par Nicolas Rouzet

Le Journal des Poètes, numéro 1 de l’année 2022 – La langue est aussi frontière, nous dit Jean-Marie Corbusier, pratiquer un art, c’est toujours ouvrir quelque chose qui est présent autour de nous. C’est d’un même esprit d’ouverture que témoignent les poètes luxembourgeois auxquels est consacré le dossier présenté par Florent Toniello. Ici les langues dépassent les frontières, elles se chevauchent…

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