Note de lecture

Panaït Istrati, Présentation des Haïdoucs, L’échappée, par Charles Jacquier

Panaït Istrati, Présentation des Haïdoucs, L’échappée/Poche, 2024, 160 p.

Présentation des Haïdoucs est le troisième volume de la tétralogie de l’écrivain roumain d’expression française Panaït Istrati (1884-1935) Les Récits d’Adrien Zograffi, mais chacun d’entre eux peut être lu séparément et celui-ci ne fait pas exception à la règle. Dans la Grotte aux Ours, quelque part dans de hautes montagnes entre les plaines du Baragan et le Danube, les haïdoucs – des bandits d’honneur roumains – sont réunis, avant la tombée de la nuit, autour de leur nouveau capitaine, la belle et intrépide Floarea Codrilor, quelques semaines après la mort de leur ancien chef, Cosma, et la défection de la moitié de sa troupe.

Après ces épreuves et dans la solitude où ils se trouvent, Floarea veut mieux connaître ses compagnons et leur propose de dire chacun à son tour qui ils sont, après l’avoir fait elle-même. Vont se succéder les récits de Floarea, d’Élie le sage, de Spilca le moine, de Movila le vataf , c’est-à-dire l’intendant d’un boïar, et de Jérémie, le fils de Floarea, avant la dernière réplique d’un haïdouc, fils d’une mère esclave qui sait bien que « partout il y a des maîtres qui règnent ». Malgré des parcours divers, ce qui motive chaque haïdouc c’est la révolte contre l’injustice des puissants et la volonté d’y répondre. Istrati n’en fait pas pour autant des héros parfaits ; ce sont des êtres complexes, « empreints de toutes les faiblesses et de toutes les contradictions de la nature humaine » comme l’écrit justement Carmen Ozsi dans sa postface. Le lecteur suivra donc chaque récit de ce conte, centré autour d’un personnage qui livre son histoire à ses compagnons, les rares joies qu’il a connues et les grands malheurs qui en ont fait un révolté animé d’un immense besoin de justice dans un monde cruel qui l’a oubliée. Au fil des réflexions des protagonistes, le lecteur retrouvera quelques-unes des idées d’Istrati lui-même. Ainsi quand Floarea constate amèrement qu’« on a beau ne pas gêner la médiocrité, […] elle ne tolère point qui se distingue d’elle ». Ou quand Elie le Sage affirme que « le meilleur des cultes [est] de n’en avoir aucun », avant de réclamer « le droit d’ignorer l’existence d’un Dieu qui me demandait de ne pas manger à ma faim et de lui chanter louanges le ventre vide ». Ou enfin quand le même souligne : « On est fort malheureux quand on a raison et qu’on reste seul. » Une phrase qui pourrait constituer à elle seule un parfait résumé de l’itinéraire d’Istrati lui-même. En effet, celui-ci a été longtemps ostracisé et n’a pu retrouver un public que des décennies après sa mort grâce à quelques passionnés. Ajoutons, pour finir, que cette belle réédition, ornée de bois gravés de Valentin Le Campion, sert l’admirable art du récit de Panaït Istrati, mis au service de la justice et de la révolte.

Charles Jacquier

François Bordes, Zone perdue, par Anne Mulpas

Zone perdue – fragments d’itinérance. Je reprends ma chronique. Sa première version date déjà d’il y a trois semaines. A L’ours & la vieille grille. Sa deuxième version s’impose après mon cheminement dans l’exposition Rothko. Me voici au troisième temps du texte, à moins que ce ne soit le quatrième, le centième…

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Étienne Faure, Vol en V, éditions Gallimard – par Anne Gourio

Note de lectureComme on suit, fasciné, la trajectoire des oiseaux migrateurs, le dernier recueil d’Etienne Faure puise dans le ballet aérien de leur « vol en V » un sens de l’élan, du franchissement, du frayage qui se nuance en légères et souples inflexions au fil des espaces traversés à...

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Frédérique Guétat-Liviani, Il ne faudra plus attendre un train, éditions LansKine – par Étienne Faure

Ce recueil emprunte son titre à l’une des trois parties qui le composent : si c’était le cas, (passe) ; il ne faudra plus attendre un train. En découvrant cette composition, on pense spontanément à un ensemble où viendrait s’intercaler le texte de (passe). Puis l’œil et l’oreille distinguent vite une même voix, dans ces deux pans, deux partis pris formels différents dans le cheminement de l’écriture de Frédérique Guétat-Liviani.

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Le journal des poètes 1/2022 – par Nicolas Rouzet

Le Journal des Poètes, numéro 1 de l’année 2022 – La langue est aussi frontière, nous dit Jean-Marie Corbusier, pratiquer un art, c’est toujours ouvrir quelque chose qui est présent autour de nous. C’est d’un même esprit d’ouverture que témoignent les poètes luxembourgeois auxquels est consacré le dossier présenté par Florent Toniello. Ici les langues dépassent les frontières, elles se chevauchent…

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