N°12, décembre 2013 – Prix Léon-Gabriel GROS, 2013

Martino Baldi

Martino Baldi, né en 1970 à Pistoia, où il vit toujours, se présente lui-même comme « un poète irrégulier et pas très prolifique ». Après plusieurs années d’intense collaboration avec divers magazines, sites internet, éditeurs et festivals de poésie, il se tient depuis quelque temps en retrait des cercles littéraires. Il travaille comme bibliothécaire à la bibliothèque San Giorgio di Pistoia, où il a dirigé l’établissement du catalogue des œuvres de Piero Bigongiari. Il est diplômé en littérature italienne contemporaine de l’Université de Florence, avec une thèse sur Goffredo Parise, qui lui a valu le prix Palazzeschi. Il a supervisé la documentation, la scénographie, et les recherches historiques en vue l’exposition littéraire Voci in un labirinto (« Voix dans un labyrinthe ») consacrée à Piero Bigongiari (Pistoia, Juillet 2000) et de son catalogue (Pagliai Polistampa, Florence 2000). Il a publié en prose Morte improvvisa di un portiere di notte (« Mort subite d’un veilleur de nuit ») (2001) et une plaquette de poèmes : Trentadue lattine (« Trente- deux boîtes ») (2002), les deux chez Asscultpress, à Pistoia. Il est le fondateur de l’e-magazine Nabanassar et occupe le poste de directeur adjoint de la revue trimestrielle Ciminiera (« Cheminée »). Pour l’éditeur Via del Vento (Pistoia), il a établi l’édition de plusieurs volumes de Piero Bigongiari et Fernando Pessoa. Pour les éditions Lieto Colle, il a traduit La metamorfosi delle piante dei piedi « La métamorphose de la plante des pieds ») de Catherine Nunes de Almeida (2008). Actif en différents domaines de la culture, il a collaboré avec le metteur en scène Cristina Pezzoli et le chorégraphe Roberto Castello. Il a été membre pendant plusieurs années du jury du prix Ceppo (La Souche) de la ville de Pistoia. Il a pris part à l’organisation de plusieurs festivals de poésie de la ville et de l’Université de Florence. Ses poèmes, son œuvre narrative et critique, ainsi que ses films ont fait l’objet d’articles en diverses anthologies et revues italiennes et étrangères. Plusieurs de ses textes ont donné lieu à des traductions en français, anglais, portugais et albanais. Capitoli della commedia (« Chapitres de la comédie ») est son premier livre de poèmes autobiographiques. Il a été publié pour la première fois en novembre 2005 dans la série « Parsifal » des éditions Atelier ; ce recueil de poésie a attiré l’attention de quelques-uns des poètes italiens les plus intéressants nés dans les années soixante-dix. Une deuxième édition du livre (la première est épuisée) a vu le jour au printemps 2006. C’est donc pour ce même ouvrage, traduit en français par Valérie Brantôme, que Martino Baldi s’est vu décerner le prix Léon-Gabriel Gros 2013 par la revue Phoenix.

Extraits

Orval

Je me rends au plaisir amer
de l’Orval, à la fragrance nue du mal
à la tentation adulte, au plan mental
de la non-résistance au péché, du laisser pénétrer en soi
toute peine, distillée ; je me rends
à la façon du trappiste inconnu et tandis
que j’écoute bruire la nuit des bords de l’Arno
je cherche la chope dans le noir et, aveugle, je goûte
l’air et les odeurs, je poursuis les arômes élevés
dans la profonde connaissance de la chute.
Elle titubera pour toujours, ma volonté vaine
de te résister ou de ne pas te résister, savoir ou ne pas savoir
que j’ai pour toi des mots trop simples
ou trop compliqués ?
Tu es la plus prudente des

***

Apocalypse d’été (I)

À présent, je suis seul dans la maison
qui a toujours été la tienne. Je respecte les rythmes
qu’une longue et lente conquête ont rendus communs.
J’ouvre grand les fenêtres peu après le crépuscule
pour accueillir la poésie de la via del Vento
et la petite brise de la via maggiore;
je m’octroie seulement la toute première lumière
– déjà plus la même – du matin précoce. Je ferme de nouveau.
Je remplis l’évier et les bouteilles au beau milieu de la nuit,
je rince assiettes et verres dans l’eau troublée
des premières tasses de café.
Je me défends comme je peux, inutilement
contre cette interminable apocalypse d’été.